Janua Coeli

Après Jésus-Christ, sans doute, _ à la distance qu’il y a de l’infini au fini_, il est une créature qui fut aussi la grande Louange de gloire de la. Sainte Trinité. Elle répondit pleinement à l’élection divine dont parle l’Apôtre; elle fut toujours pure, immaculée, irrépréhensible, aux yeux du Dieu trois fois saint.
Son âme est si simple, les mouvements en sont si profonds que l’on ne peut les surprendre. Elle semble reproduire sur la terre cette vie qui est celle de l’Être divin, l’Être simple. Aussi est-elle si transparente, si lumineuse, qu’on la prendrait pour la lumière. Pourtant, elle n’est que le miroir du soleil de justice, « Speculum justitiae... »

La Vierge conservait ces choses en son cœur ».
Toute son histoire peut se résumer en ces quelques mots ; c’est en son cœur qu’elle vécut, et en une telle profondeur que le regard ne peut la suivre. Quand je lis dans l’Évangile que Marie parcourut en toute diligence les montagnes de Judée pour aller remplir son office de charité près de sa cousine Élisabeth, je la vois passer si belle, si calme, si majestueuse, si recueillie au dedans, avec le Verbe de Dieu! Comme lui, sa prière fut toujours celle—ci Ecce! Me voici. — Qui? — La servante du Seigneur, la dernière de ses créatures, Elle, sa Mère!
Elle fut si vraie en son humilité! C’est qu’elle fut toujours oublieuse, ignorante, délivrée d’elle-même. Aussi pouvait— elle chanter : «  Le Tout-Puissant a fait en moi de grandes choses ; désormais toutes les nations m’appelleront bienheureuse »
Cette Reine des Vierges est aussi Reine des martyrs ; mais c’est encore en son cœur que « le glaive la transperça », car chez Elle tout se passe au dedans... Oh qu’elle est belle à contempler durant son long martyre, si sereine, enveloppée dans une sorte de majesté qui respire à la fois la force et la douceur ! C’est qu’elle avait appris du Verbe lui-même comment doivent souffrir ceux que le Père a choisis comme victimes, ceux qu’Il a résolu d’associer à la grande œuvre de rédemption, « ceux qu’il a connus et prédestinés pour être conformes à son Christ »,  crucifié par amour. Elle est là, au pied de la Croix, debout dans la force et la vaillance ; et voici mon Maître qui me dit : « Ecce mater tua ». Il me la donne pour Mère! Maintenant- qu’il est retourné au Père, qu’il m’a substituée à sa place sur la croix, afin que je souffre en moi « ce qui manque à sa Passion pour son corps qui est l’Église », la Vierge est encore là pour m’apprendre à souffrir comme lui, pour me dire, pour me faire entendre ces derniers chants de son âme, que nul autre qu’elle, sa Mère, n’a pu surprendre.

Quand j’aurai dit mon « consummatum est », c’est encore elle, Janua coeli, qui m’introduira dans les parvis divins, me disant tout bas la mystérieuse parole « Laetatus sum in his quae dicta sunt mihi, in domum Domini ibimus!... »

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